Dr Moriae Lynch reliée à Jane K. Conrad / Eugène de Brocéliande / Sanguini

N’allez pas croire qu’il n’y eut jamais de scandale au cœur de l’hôpital Ste Morgane. Ils ont fait leur temps, peut-être. Mais n’allez pas croire non plus que vous en serez exempté si vous y entrez. Voyez-vous, il y a une fascination exquise chez les hommes pour l’inconnu et les femmes aussi délicieuses que terrifiantes. Une fascination des plus malsaines, vous comprenez ? De celles qui vous nouent les entrailles jusqu’à assouvir la moindre pulsion.

Pourtant, tous à l’hôpital la craignent autant qu’ils l’admirent en silence. Jamais son nom n’est prononcé et surtout pas devant Eugène de Brocéliande. Ce qui n’empêche pas le Docteur Lynch d’être au cœur des conversations et des commérages, surtout des commérages. Et pour cause, on murmure dans les couloirs des pratiques fort peu catholiques, pour ne pas dire barbares. On murmure entre deux murs qu’elle exercerait d’étranges expériences sur les patients dont les cas sont les plus inquiétants. On murmure enfin qu’elle aurait pactisé avec le diable pour repousser les limites de la magie et des sciences. Un territoire sur lequel ne s’était jamais aventuré le glorieux directeur de l’hôpital. Pour quelle raison la gardait-il entre ses murs ? Pour garder un œil sur elle bien sûr. Car de ce que l’on raconte, la rivalité ferait rage entre les deux individus, dont l’un joue avec les cœurs tandis que l’autre les répare, ou du moins essaie.

Moriae Lynch, la doctoresse sulfureuse dont hommes et femmes ne cessent de s’arracher la vertu. Entre deux cigarettes, elle les examine alors, marchande avec eux pour obtenir tout ce que sa soif de savoirs réclame. Certains ne sont d’ailleurs jamais ressortis de son laboratoire mais qui oserait y mettre les pieds quand on chuchote que des rats enragés et drogués à la magie noire le gardent ? Nombreuses sont les fables qui entourent le Dr Lynch, et peu en connaissent la véritable teneur. Elle-même aime à les nourrir, mais dites-vous bien que cette femme a le cœur aussi noir que l’encre avec laquelle elle répand les fruits de son dur labeur. Nombreux sont ses rires et ses sourires, nombreux sont les mots doux destinés à ses amants, mais tout n’est qu’artifice. Est-ce chose voulue ? Que nenni. Madame ne joue pas des apparences, Madame n’en a cure et se moque bien de ce que l’on colporte sur elle. Elle est femme de science, femme de l’obscurité, et n’a que faire du monde extérieur si celui-ci ne lui offre pas un détail suffisamment utile à ses recherches. Depuis vingt longues années, elle s’y adonne ... et ses écrits, antérieurs à sa sombre pratique de la magie, en ont inspiré quelques uns. Certains sont même à disposition dans les feuillets scientifiques accessibles en bibliothèque.
Nul ne sait son but, nul ne sait la raison de la folie de son âme. Tant de chaleur et de beauté pour une âme depuis mille fois damnée.